RÉTABLIR LA VÉRITÉ : LA FORME ET LE FOND
par Louis SAISI
« La forme c’est le fond qui remonte à la surface« , cette citation célèbre attribuée à Victor HUGO illustre la très forte et houleuse séquence de discussion parlementaire qui s’est déroulée à l’Assemblée nationale pendant 12 jours, du 6 au 17 février 2023, à l’occasion de l’examen du projet de loi portant sur la réforme des retraites. Lors de la discussion de ce texte, l’on a critiqué, voire dénoncé et fustigé [1] la manière dont le groupe LFI avait usé de son droit d’amendement pour s’opposer aux dispositions du projet de loi précité conçu par le Gouvernement.
Sur les quelque 20 000 amendements déposés [2], plusieurs milliers le furent par la France insoumise (LFI). Si plusieurs milliers d’entre eux furent retirés ensuite, l’on imputa à l’attitude des députés LFI le fait que l’examen du projet gouvernemental n’ait pu être mené jusqu’au bout, et ait dû s’arrêter le vendredi 17 février 2023 à minuit.
Il y a lieu toutefois de souligner que nous sommes loin des 41 000 amendements déposés en 2020 lors de la précédente tentative de réforme des retraites, et encore beaucoup plus loin du record de 2006, année durant laquelle plus de 137 000 amendements furent déposés lors du débat sur la privatisation de GDF. Mais de quoi parle-t-on?
Rappelons que le droit d’amendement est le droit pour tout parlementaire de soumettre au vote des assemblées parlementaires des modifications aux textes dont elles sont saisies, qu’il s’agisse de projets de loi (d’initiative gouvernementale), ou de propositions de loi (d’initiative parlementaire). Ce droit peut être considéré comme un « prolongement » du droit d’initiative législative.
Du fait que, de plus en plus, l’initiative législative est d’origine gouvernementale, avec le temps, ce droit d’amendement est même devenu dans de nombreux parlements, et notamment en France, la forme d’expression principale du droit d’initiative des parlementaires.
Plusieurs milliers d’amendements sont ainsi déposés chaque année.
Ce droit est consacré par la Constitution elle-même car il trouve sa source dans son article 44 dont le premier alinéa stipule que « les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d’amendement ».
Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, cet article précise que ce droit « s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les règlements des assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique ».
Le principe général, affirmé par l’alinéa 1er de l’article 45 de la Constitution, est que le droit d’amendement s’exerce librement au stade de la première lecture : tout amendement est recevable à ce stade dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte.
Par ailleurs, le reproche formulé contre les députés de LFI oublie qu’en démocratie, la FORME et la manière dont on se prononce sur un texte, pour aussi importantes qu’elles soient, sont fortement tributaires du FOND, c’est-à-dire d’une adhésion ou d’un désaccord, voire d’un rejet radical de ce même texte dans sa philosophie.
C’est qu’en effet la forme est le plus souvent au service du fond.
Elle doit être conforme au fond et s’attacher à en être la plus authentique expression.
En cas de désaccord – et a fortiori de rejet -, dès l’instant que LES FORMES à travers lesquelles ce dissensus s’exprime sont respectées, il est normal et légitime que ces mêmes formes légales ou constitutionnelles soient pleinement utilisées, même de la manière la plus maximale qui soit, dès l’instant qu’elles sont conformes à la « règle du jeu » mettant aux prises des partenaires rivaux et revêtent l’expression d’un droit fondamental.
Le droit d’amendement est ainsi devenu, de plus en plus souvent, un droit de protestation voire de légitime défense des parlementaires contre un texte gouvernemental dont ils ne veulent pas, soit dans sa totalité, soit dans certaines de ses parties.
La constitutionnalité et la légitimité du recours par LFI à une cascade d’amendements ne faisait donc aucun doute.
Certes, devant les citoyens français la légitimité d’une telle attitude rebelle et frondeuse aurait pu être mise en cause si le Gouvernement avait pu au moins invoquer le fait qu’il représentait la volonté du pays contre ces parlementaires réfractaires ainsi que de nombreux autres, ainsi que l’a montré, comme nous le verrons, le rejet de l’article 2 de son projet.
Était-ce le cas ? La réponse est négative comme nous allons le voir.
I/ De quoi parlait-on à l’Assemblée nationale, du 30 janvier au 17 février 2023 ? D’un projet de réforme dont le pays ne veut pas…
La séquence de la discussion à l’Assemblée nationale du projet de loi sur la réforme des retraites – dont le volet principal se proposait de reculer l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans – a fait grand bruit non seulement au sein de l’hémicycle mais aussi dans notre landerneau politico-médiatique.
A/ Un texte dont le pays ne veut toujours pas
Est-il besoin de rappeler que ce texte portant sur la réforme des retraites est un texte dont le pays ne veut pas, puisqu’un nouveau sondage de l’Institut CSA pour CNEWS, publié le 15 février dernier, révélait que près de 7 Français sur 10 (67%) étaient toujours opposés au projet de réforme des retraites du Gouvernement.
Ci-dessous, manifestation massive à Paris le 31 janvier 2023 contre la réforme des retraites
Quant à la manière de s’opposer au Gouvernement, et confortant cette opinion majoritaire des Français, selon le nouveau sondage Elabe « L’Opinion en direct » pour BFMTV, 58% des Français (soit près de 6 Français sur 10) sont largement favorables à la volonté de l’intersyndicale de « mettre la France à l’arrêt » le 7 mars 2023, pour contrer la réforme des retraites.
B/ Une attitude combative de la NUPES et surtout de LFI en phase avec le large rejet du texte par le pays est-elle répréhensible?
Paradoxalement, l’attitude combative de la NUPES, et plus particulièrement de LFI, a suscité de la part de la presse écrite et des médias un flot de commentaires en général excessivement critiques et souvent acerbes vis-à-vis de la NUPES d’abord, puis ciblés exclusivement sur LFI – quand ça n’était pas sur MELENCHON directement lui-même -, à cause de l’abondance des amendements déposés par le groupe LFI, analysés comme une entrave au fonctionnement de l’institution parlementaire.
Cette vertueuse indignation contre le blocage, au niveau de l’Assemblée nationale, d’un texte dont le pays ne veut pas et la contestation de la légitimité d’une telle opposition – qui n’a fait qu’emprunter l’arsenal des moyens constitutionnels dont dispose les parlementaires avec leur droit d’amendement – ont de quoi surprendre.
Ainsi, à propos des retraites (projet de loi dont la disposition principale est d’en différer l’âge de départ à 64 ans), lorsqu’il s’agit de la non-adoption par l’Assemblée nationale d’un texte dont le pays ne veut pas – alors que cette même chambre des députés est, elle-même, censée représenter normalement la volonté du peuple de notre pays – voilà qu’aussitôt la « faute » de cette situation, a priori on ne peut plus normale, est largement imputée au groupe LFI, et même nommément à son principal responsable Jean-Luc MELENCHON.
Ci-dessous, vote des députés de la NUPES lors de l’examen du projet de loi sur la
réforme des retraites au cours de la séance du 8 février 2023 à l’Assemblée nationale
Curieux procès, alors même que ce groupe politique ne fait que traduire le rejet de la part d’une large majorité de Français de ce texte qu’il faut bien qualifier de « retraiticide », car quoi de plus important, dans la retraite, que la date de son départ ?
Ces récents débats sur la réforme des retraites ne sont donc qu’une vivante illustration que la forme est naturellement au service du fond. Ou, mieux encore, selon l’excellente citation déjà évoquée, que « La forme c’est le fond qui remonte à la surface »…
Ci-dessous, le Ministre du Travail, Olivier DUSSOPT
fustigeant les députés LFI, le 17 février 2023, à l’Assemblée
nationale lors de la clôture des débats sur la réforme des retraites
La tension qui a régné entre LFI, les députés de la NUPES et le Gouvernement au cours des débats a été portée à son paroxysme à la clôture de ceux-ci, le 17 février, lorsque le Ministre du Travail, Olivier DUSSOPT, a apostrophé la NUPES en termes virulents : « Nous arrivons désormais au terme de nos débats… Les 20.500 amendements déposés par la NUPES auront empêché notre assemblée d’achever l’examen du texte. Au terme de neuf jours de séance et 73 heures de débat, le gouvernement ne peut pas prolonger l’examen du texte sans réduire le temps que le Sénat doit avoir. (…) L’Assemblée nationale n’ayant pas émis de vote en première lecture sur l’ensemble du projet de loi, le gouvernement saisira le Sénat du texte (…) Mesdames et Messieurs les députés insoumis, vous m’avez insulté 15 jours, vous sortez, mais vous m’avez insulté, personne n’a craqué ! Personne n’a craqué ! Et nous sommes là devant vous, pour la réforme ! »
Pourtant, délai constitutionnel oblige qui, lui, n’a pas dépendu de la NUPES ni de LFI…
Mais, surtout, l’on peut, à bon droit, s’étonner de ces cris d’orfraie car si la totalité du texte n’a pas été examiné, à qui la faute ? Qui était le véritable maître des horloges ?
Le Gouvernement lui-même, comme nous allons le voir ci-dessous…
II/ Le choix originel contestable du Gouvernement du véhicule législatif de l’article 47 alinéa 1er de la Constitution à cause d’un calendrier législatif plus favorable
Ci-dessous, la Première Ministre Elisabeth BORNE
sur le banc du Gouvernement au sein de l’hémicycle
En choisissant la procédure plus contraignante de l’article 47.1 de la Constitution, le Gouvernement avait donné seulement 20 jours à l’Assemblée Nationale – examen du texte en commission et débat public sur celui-ci au sein de l’hémicycle – pour débattre et voter le projet de loi rectificatif de financement de la sécurité sociale [3] qui devait servir de « véhicule législatif » pour tenter de faire passer rapidement la réforme des retraites avec le très controversé recul de l’âge de départ légal à 64 ans.
A/ Le calcul politique du Gouvernement
1/ Le choix de la procédure de l’article 47-1 de la Constitution [4]
Le choix de la procédure de l’article 47-1 par le Gouvernement avait pour but, à l’Assemblée nationale, de passer outre aux oppositions et aux amendements déposées par celles-ci, étant entendu qu’au bout de 20 jours, que le texte ait été voté ou pas, le Sénat, dominé par une droite favorable au recul de l’âge de départ à la retraite, reprend la main.
Or, le Sénat doit lui-même ensuite se prononcer dans un délai de 15 jours, ce qui devrait lui suffire à adopter le texte avec son très controversé article 7.
Ensuite, en cas de désaccord, s’opère le jeu de la navette entre les deux assemblées dans les conditions prévues par l’article 45. La mise en place probable d’une commission mixte paritaire (CMP) entre les deux assemblées, devrait permettre à quelques députés et sénateurs de se mettre d’accord sur un texte commun car, comme le diagnostiquait dans Le Figaro un député Renaissance, « Sénateurs de droite et députés de la majorité seront en supériorité numérique en CMP, ce qui permettra de trouver un point d’atterrissage au vu du deal entre Les Républicains et Elisabeth BORNE ».
En effet, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 45 de la Constitution, le texte élaboré par la CMP peut être soumis par le Gouvernement pour approbation aux deux assemblées, aucun amendement n’étant recevable sans l’accord du Gouvernement.
Formellement au moins, s’agissant d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale, la recherche d’un accord entre les deux assemblées est limitée dans le temps, car le Parlement doit se prononcer dans un délai de 50 jours, à l’issue duquel faute d’accord entre les deux assemblées, « les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance. »
2/ L’examen du projet de loi gouvernemental
Malgré l’importance du texte portant sur les retraites, force est de constater que le Gouvernement a choisi de mettre sa fusée « réforme des retraites » sur orbite, sans trop vérifier sa compatibilité avec sa rampe de lancement constituée par tous les mécanismes et supports institutionnels…
C’est ainsi que déposé par le Gouvernement le lundi 23 janvier 2023 et renvoyé à la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale [5], le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, n° 760, est arrivé au Palais Bourbon le 28 janvier 2023, la Commission compétente ayant commencé l’examen du texte à partir du 30 janvier 2023.
En effet, selon Fadila KHATTABI, Présidente de la Commission des affaires sociales, les 20 jours dont dispose l’Assemblée nationale en première lecture sont décomptés depuis le 28 janvier 2023, date à laquelle la Première Ministre Élisabeth BORNE a formellement indiqué à la Présidente Yaël BRAUN‑PIVET que l’ensemble des annexes au projet de loi avait été déposé.
La date limite de dépôt d’amendement en séance publique ayant été fixée au jeudi 2 février à dix-sept heures, la commission a travaillé jusqu’à la veille au soir. Elle a donc disposé de vingt-huit heures de réunion.
Ce texte – dont l’examen en séance publique de l’Assemblée nationale n’a commencé que le 6 février 2023 – devait donc normalement être voté au plus tard le samedi 18 février, mais ce délai fut encore raccourci car il dut être ramené au vendredi 17 février à minuit par le Gouvernement, l’Assemblée nationale ne siégeant pas le samedi.
Or sur les 20 articles composant le projet de loi, lors de la reprise des débats, le vendredi 17 février au matin, les députés ne s’étaient prononcés que sur 3 articles, après le rejet de l’article 2 portant sur la situation des seniors.
C’est donc le Gouvernement lui-même qui, en choisissant un projet de loi rectificatif du financement de la sécurité sociale, a enfermé l’Assemblée nationale dans un délai très bref de 20 jours pour lui faire adopter son projet de réforme des retraites.
C’est également le Gouvernement qui avait choisi de placer la disposition la plus importante et la plus contestée de son projet – celle du recul de l’âge de la retraite à 64 ans – dans l’article 7, alors qu’il eut pu la placer dans l’article 1 ou 2 puisqu’il connaissait le nombre important d’amendements déposés sous chacun des premiers articles de son projet (notamment 1 à 3) dont la discussion risquait de retarder l’examen de l’article 7, voire de le rendre impossible dans les délais constitutionnellement requis.
En principe, les dispositions les plus importantes d’un projet de loi sont placées dans les premiers articles car ils sous-tendent la philosophie du projet et en sont le cœur. Mais, parfois, il arrive que le Gouvernement biaise, notamment lorsqu’il craint une opposition vive, voire radicale, à de tels articles. Il les décale alors plus loin quant à l’ordre numérique de leur présentation, ce qui fut le cas, ici, de l’article relatif au recul de l’âge de la retraite porté à 64 ans (article 7).
B/ Un choix constitutionnellement discutable
1/ Rappel de la composition des forces politiques de l’Assemblée nationale
2/ La stratégie de contournement des oppositions à l’Assemblée nationale
Les oppositions politiques à l’Assemblée nationale viennent d’une part de la NUPES comptant entre 130 et 150 députés, d’autre part, du Rassemblement National composé de 89 députés, forces toutes deux hostiles à la réforme des retraites et à la majorité gouvernementale en général. Mais ces deux formations politiques étant elles-mêmes dans un rapport fondamentalement antagoniste, sont loin de s’allier car opposées sur tout, mais comme dans tout vote, elles peuvent se rencontrer, ce qui ne signifie pas pour autant une collusion entre ces deux forces.
En effet, comme on le sait, depuis les dernières élections législatives des 12 et 19 juin 2022, la XVIe législature qui est sortie de ce scrutin est l’une des plus fragmentées de la Ve République car, pour la première fois, un Président venant tout juste d’être fraîchement élu ne dispose pas d’une majorité absolue pour soutenir sa politique à l’Assemblée nationale.
Sur les 577 députés composant l’Assemblée Nationale, si, avec 245 sièges, le parti présidentiel Ensemble reste la principale force politique de l’Assemblée nationale, il perd largement sa majorité absolue.
Or seul le parti de droite Les Républicains (LR) qui, avec 61 sièges, a perdu la moitié de sa représentation nationale, et se situant comme 3e force politique dans l’opposition à la majorité parlementaire d’origine présidentielle, peut, ponctuellement, selon les projets gouvernementaux et leur contenu, apporter l’appoint de voix nécessaires pour l’adoption de ceux-ci, mais en négociant âprement son aide conjoncturelle.
Dans ce contexte politique incertain, et faute d’un accord préalable et formel sur la réforme des retraites entre le parti présidentiel et LR, la stratégie du Gouvernement visait à se prémunir contre le risque d’un enlisement d’un débat parlementaire d’autant plus difficile et gênant qu’il se doublait d’une mobilisation sociale forte avec l’annonce par l’Intersyndicale de la journée de blocage du pays le 7 mars prochain. En même temps, la procédure législative choisie lui permettait d’éviter l’impopulaire recours à un énième article 49-3 de la Constitution (adoption du texte sans vote après l’engagement par le Gouvernement de sa responsabilité devant l’Assemblée nationale).
3/ Un projet de loi dont la constitutionnalité est douteuse
Le choix de la procédure choisie par le Gouvernement est, comme nous l’avons évoqué dans le § précédent ci-dessus, un choix de pure opportunité politique et stratégique qui ne respecte guère l’orthodoxie constitutionnelle, ce qui disqualifie le Gouvernement dans sa critique de l’obstruction, elle, tout à fait constitutionnelle, de la NUPES et plus précisément de LFI.
En effet, il s’agit de l’embarquement clandestin opéré par le Gouvernement d’un texte sur la réforme des retraites dans le bateau que constitue le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023. Or, ce dernier doit obligatoirement avoir une incidence sur les recettes et les dépenses des régimes de base de la Sécurité sociale pour l’exercice en cours, sans quoi le Conseil constitutionnel pourrait censurer les articles qu’il juge problématiques.
Le Gouvernement avait d’ailleurs lui-même transmis le PLFRSS au Conseil d’Etat afin que la Haute juridiction administrative étudie sa conformité à la Constitution sur le plan juridique. Or, à cette occasion, le Conseil d’Etat aurait émis des réserves sur un certain nombre d’articles présents dans le texte. En effet, selon BFMTV [6], le Conseil d’Etat, par une note confidentielle adressée au Gouvernement, lui aurait en retour signalé un certain nombre d’indélicatesses juridiques par rapport à la Constitution. La réforme n’aurait pas, en effet, d’impact financier en 2023, ce qui est normalement le champ d’application du PLFRSS.
De son côté, Dominique ROUSSEAU, professeur de droit constitutionnel à Paris-1 Panthéon-Sorbonne, explique que « L’article 47.1 ne peut être utilisé que pour les lois de finance et de financements de la Sécurité sociale de l’année. Il prévoit un délai d’une durée limitée afin que ces lois soient adoptées avant le 31 décembre ». Il s’agit donc pour lui d’« un détournement de procédure » [7] car les « lois de finance rectificatives n’ont aucune urgence à être adoptées ». Le calendrier très restreint imposé par le Gouvernement n’aurait donc aucune légitimité constitutionnelle.
À l’opposé, Michel LASCOMBE, agrégé de droit public et spécialiste du droit constitutionnel, considère, pour sa part, que l’article 47.1 peut être appliqué à des projets de loi rectificatifs car selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, jusqu’ici, l’application du 47-1 dans le cadre de projets de loi rectificatifs, a toujours été acceptée par la Haute instance de la rue de Montpensier, la modification du budget de l’année en cours étant souvent considérée comme urgente [8].
En revanche, c’est dans le cadre de la prohibition des « cavaliers budgétaires » que les dispositions relatives à la réforme des retraites pourraient, selon le même Michel LASCOMBE précité, être censurées par le Conseil constitutionnel.
En effet, selon Michel LASCOMBE « La loi de financement rectificative a pour objet de redresser le budget et certaines dispositions du projet seront vraisemblablement considérées comme contraires à la Constitution parce qu’elles ne changent rien à l’équilibre financier. » C’est notamment le cas de la création d’un « index sénior » afin d’encourager le travail des plus de 55 ans mais aussi des critères de pénibilité, etc. [9]
C’est d’ailleurs en ce sens que, sortant de la réserve à laquelle ses Hautes fonctions l’obligent, aurait curieusement abondé Laurent FABIUS, lui-même Président du Conseil constitutionnel, dont le commentaire discret mais très clair aurait néanmoins fuité dans Le Canard enchaîné du 18 janvier 2023 :
« Tout ce qui est hors champ financier peut être considéré comme un cavalier budgétaire, et dans ce cas, il faudrait une deuxième texte », aurait-il prévenu et donc implicitement mis en garde [10].
C/ Les déboires du Gouvernement
1/ Le rejet de l’article 2 du projet
L’article 2 du projet de loi du Gouvernement prévoyait la mise en place d’un index devant être mis en place en entreprise pour lutter contre le chômage des seniors.
Le 14 février 2023 cet article a été rejeté par 256 voix contre 203, et 8 abstentions.
Quant à son inspiration, cet index était le fidèle décalque de celui de l’« égalité professionnelle » entre femmes et hommes mis en place depuis 2019.
En effet, depuis 2019, toutes les entreprises de plus de 250 salariés et, depuis 2020, toutes celles de plus de 50 salariés doivent calculer et publier leur Index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (note globale sur 100), chaque année au 1er mars.
Créé par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, l’Index de l’égalité professionnelle permet aux entreprises de mesurer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et met en évidence les points de progression sur lesquels agir quand ces disparités sont injustifiées.
En ce qui concerne l’Index appliqué aux seniors, le dispositif imaginé par le Gouvernement visait à obliger certaines entreprises à publier chaque année des indicateurs de suivi relatifs à l’emploi des salariés seniors ainsi qu’aux actions mises en œuvre pour le favoriser.
Après avoir été débattu durant trois journées, le rejet de cet article a constitué un véritable coup de théâtre du fait du rapport de force dans l’Hémicycle.
La Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) – qui a accueilli ce résultat par des vivats et des chants – ainsi que le groupe Les Républicains (LR) se sont prononcés contre cet index devant permettre d’améliorer l’emploi des salariés âgés. Les députés Rassemblement national (RN) ont également voté contre. « Ce soir, toute la gauche et le FN [Front national, l’ancien nom du RN] célèbrent le fait de supprimer » cet index, a déploré le Ministre du Travail, Olivier DUSSOPT, qui les traita de « Tartuffe ».
Recensement très partial et surtout sélectif des opposants de la part du Ministre qui oublia de mentionner également l’opposition des LR qui permit la mise en échec du dispositif du Gouvernement. En effet, le Ministre et l’ensemble du Gouvernement auraient dû au moins convenir que leur défaite n’aurait pas été possible sans la défection d’une partie de la droite.
Quant à son opposition au texte, la gauche considère l’index comme « une coquille creuse » ou « un couteau sans manche qui aurait perdu sa lame ». « Pourquoi n’avez-vous pas commencé par une loi sur le vieillissement au travail, l’emploi des seniors pour conclure s’il fallait ou non une réforme des retraites ? », a demandé Boris VALLAUD (Parti socialiste, PS).
Quant aux députés LR, ils ont justifié leur opposition à l’index seniors en le considérant comme « inadapté aux réalités des PME » et comme n’allant « pas améliorer le taux d’emploi des seniors ».
Toujours à droite, de son côté, Aurélien PRADIÉ (LR) avait évoqué le risque d’« inconstitutionnalité » de l’index, un « cavalier » législatif qui n’a, selon lui, pas sa place dans un texte budgétaire, comme celui choisi par le gouvernement pour faire passer sa réforme des retraites. Commentaire incontestablemen avisé mais qui doit porter également sur l’ensemble des dispositions du texte axées sur la réforme des retraites.
Ce fut un premier revers sérieux pour le Gouvernement sur la réforme des retraites.
Mais ce ne fut pas le seul.
2/ Inventaire des articles adoptés laborieusement
Le projet sur la réforme des retraites comporte 20 articles. Tous les articles n’ont pas été débattus en raison du temps réduit d’examen consacré au texte.
Les contraintes du calendrier constitutionnel sur la durée des débats sur la réforme des retraites dû au choix du PLFRSS débouchèrent sur la clôture de l’examen du texte le vendredi 17 février à minuit, alors même que la grande majorité des articles du projet de loi ne furent pas débattus ni encore moins votés.
Ont été seulement abordés et débattus : l’article liminaire, l’article premier relatif à la suppression des régimes spéciaux ; l’article 2 relatif à l’index seniors.
L’examen de ces premiers articles du texte a entraîné de nombreuses tensions et conflits entre la majorité présidentielle et les oppositions quant à leur adoption ou leur rejet.
Ainsi l’article liminaire – qui constituait une introduction générale fixant les orientations du projet de loi, en particulier sur les dépenses de l’assurance maladie – a été l’objet d’une adoption douloureuse par 246 députés voix pour, et 229 contre, soit une faible majorité de 17 voix.
L’adoption de l’article 1er a été enfantée dans la douleur lors d’une séance tendue le 10 février 2023 portant sur la suppression des régimes spéciaux. Il s’agissait de décider que les personnes recrutées à partir du 1er septembre 2023 dans les secteurs des transports, de l’énergie ou encore du notariat, seront affiliées au régime général. Le vote en faveur de cette disposition très sensible a été acquis par 181 voix pour, contre 163.
Les difficultés pour le camp présidentiel de pouvoir compter sur le soutien des votes des députés LR sont vite apparues incontournables lors des discussions et surtout du vote sur cet article 1er (27 LR pour, 15 contre, 8 abstentions) illustrant les clivages au sein de cette formation politique quant à son positionnement par rapport au parti majoritaire et dominant macronien [11].
Nous ne reviendrons pas, pour l’avoir analysé plus haut, sur le rejet de l’article 2 qui visait à instaurer un index sur l’emploi des seniors, sinon pour souligner que malgré les nouvelles concessions faites par Élisabeth BORNE aux Républicains (LR) sur les carrières longues [12], le parti LR n’a pas rallié le parti présidentiel sur ce dispositif mais a préféré se joindre aux autres oppositions pour le mettre en échec, ce qui montre la fragilité, au Parlement, du parti présidentiel qui manifestement peine à trouver une majorité de soutien qui soit ferme avec des contours clairs.
En effet, pas moins de 38 députés LR ont voté contre cet index sur l’emploi des seniors, 6 s’étant abstenus, aucun ne l’ayant soutenu.
Selon les déclarations faites le même jour (15 février 2023) sur France 2 par leur président, Éric CIOTTI, il s’agissait d’ « un espèce de machin qui allait peser sur le travail quotidien des entreprises ».
Enfin, après le rejet surprise de l’article 2, l’article 7 – article clé du projet de loi sur la réforme des retraites reportant l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et accélérant le passage progressif aux 43 annuités nécessaires – n’a pas été examiné par les députés, faute de temps, ainsi d’ailleurs que les articles allant de 3 à 20.
3/ Non-examen de la quasi-totalité des articles du projet de loi concernant les retraites
L’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale ayant débuté le 6 février en séance publique, pour s’achever le 17 février à minuit, le Sénat devra se pencher, à son tour, sur le texte en séance publique, normalement du 2 au 12 mars, en abordant, outre les articles examinés par l’assemblée nationale (que nous avons évoqués), ceux portant sur :
- les articles 3 à 6 relatifs aux dispositions techniques propres au budget et aux rapports financiers ;
- l’article 7 relatif au report de l’âge légal de 62 à 64 ans et le relèvement progressif de l’âge légal pour les salariés nés à partir de septembre 1961, et l’accélération du passage progressif aux 43 annuités nécessaires ;
- l’article 8 relatif au dispositif des carrières longues et incapacité : création d’une règle générale pour les départs avant l’âge légal dans le cas d’une carrière commencée avant un certain âge, ainsi que ceux pour handicap ou incapacité permanente. Cet article rejoint les débats sur 44 annuités pour certaines personnes ayant commencé avant 20 ans ou sur la pénibilité.
- l’article 9 sur la prévention de l’usure professionnelle : renforcer la sensibilisation et la prévention sur l’usure professionnelle avec un fonds dédié et une modification du compte pénibilité (C2P).
- l’article 10 relatif au relèvement du montant de certaines petites retraites : c’est rien de moins que la fameuse polémique sur le montant de 1 200 euros qui est en jeu sur ce texte, qui prévoit de revaloriser le complément versé par l’Etat pour des personnes retraitées « ayant effectué une carrière complètement cotisée sur la base d’un Smic » ;
- l’article 11 sur la prise en compte de certaines périodes de stages spécifiques dans le calcul de la retraite : cette disposition concerne particulièrement les personnes ayant effectué des travaux d’utilité collective (TUC), dont les cotisations ne valident pas, pour le moment, de trimestres ;
- l’article 12 sur la prise en compte de la situation des aidants : création d’une assurance vieillesse des aidants (AVA) permettant d’ouvrir des droits à la retraite aux aidants en prenant en compte le temps consacré à des enfants ou parents proches en situation de handicap ;
- l’ article 13 sur le cumul emploi-retraite et retraite progressive : assouplir les règles de plafond pour un cumul emploi-retraite. Permettre aux retraités à taux plein d’acquérir de nouveaux droits dans le cadre du cumul emploi et retraite, dans le cas d’une reprise d’activité ;
- les articles 14 à 20 sur les dotations et montants prévus des dépenses : (dont assurance maladie, accidents du travail et maladies professionnelles, autonomie, assurance-vieillesse).
CONCLUSIONS
1/ Si, à l’issue de la procédure de l’article 47-1 choisie par le Gouvernement pour faire adopter sa réforme des retraites, celle-ci était adoptée par le Parlement, il est très fortement prévisible que les députés de LFI et plus largement des autres composantes de la NUPES saisiront, à juste titre, le Conseil constitutionnel en invoquant l’inconstitutionnalité de la procédure choisie par l’Exécutif. En effet, la loi de financement de la sécurité sociale est strictement encadrée par les textes constitutionnels et organique. Par ailleurs, son contenu est également précisé par l’article LO 111-3 du Code de la sécurité sociale qui détermine le contenu de la loi de financement de la sécurité sociale.
Les députés auteurs d’une telle saisine devraient obenir gain de cause devant le Conseil constitutionnel, en application de la propre jurisprudence de cette Haute instance dans cette matière.
En effet, dans sa décision n° 2021-832 DC du 16 décembre 2021 relative à la Loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 [13], le Conseil constitutionnel déclara inconstitutionnelles un certain nombre de dispositions de cette loi, et notamment celles de ces paragraphes II à IV de l’article 28 de la loi déférée car » elles ne trouvent (…) pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale et sont ainsi contraires à la Constitution« .
Il en fut de même de l’article 41 dont les dispositions « sont (…) contraires à la Constitution » car « n’ayant pas d’effet ou (…) un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement… Elles ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale. Dès lors, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale. »
De même, les articles 46, 70, 75, 87, 90, 94, 95 de cette même loi, pour les mêmes raisons, furent déclarés contraires à la Constiution.
De même, enfin, les dispositions de l’article 63 (rapport dans le délai d’un an sur la révision des actes hors nomenclature et leur financement), celles du § III de l’article 64 (liste des dispositifs médicaux en nom de marque qui peuvent faire l’objet d’une substitution), du III de l’aricle 85 (rapport sur la contraception masculine), de l’article 106 (sur l’amélioration de la couverture sociale contre le risque d’accidents du travail et de maladies professionnelles de certains travailleurs indépendants) qui, selon le Conseil constitutionnel, « n’ont pas pour objet d’améliorer l’information et le contrôle du Parlement sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale au sens des dispositions du 4 ° du C du paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale … ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale… sont (…) contraires à la Constitution. »
2/ Ainsi notre Constitution déjà autoritaire n’empêche pas le Président et son Gouvernement de lui tordre le bras, à l’occasion, pour la rendre encore plus malléable et simplifier le passage de la Loi devant le Parlement afin de ne faire du débat parlemenaire qu’une simple formalité. C’est la tendance très forte de nos gouvernans depuis quelques décennies de vouloir s’affranchir de contraintes juridiques insupporables à leurs yeux
Ainsi, comme le souligne Lauréline FONTAINE, la violation de la Constitution n’est guère l’objet d’une préoccupation docrinale même chez les juristes et au sein des cénacles universitaires :
« Dans la doctrine contemporaine du droit constitutionnel, personne – ou presque – ne recourt à l’idée de violation de la Constitution pour décrire et analyser son objet. Personne même ne semble habilité à y recourir. On relève deux thèses sur le sujet, dont une très récente, mais aucun article ne lui est consacré, le recours à l’expression comme concept doctrinal autonome est très faible, dans les manuels notamment, et insuffisamment significatif. La notion de violation de la Constitution apparaît plutôt réservée à trois autres catégories d’acteurs : les journalistes et les citoyens (que par commodité on range ici dans la même catégorie), les acteurs politiques, et le juge. C’est bien quand l’une de ces trois catégories l’utilise, que le constitutionnaliste, bon ouvrier de la description factuelle des événements normatifs et de la pratique qui les environne, s’autorise à la reproduire, à la condition que ce soit bien comme un objet qui lui serait extérieur. Le constitutionnaliste peut ainsi décrire le juge en train d’utiliser l’expression de violation de la Constitution, en cherchant la plupart du temps à en expliciter le sens, mais presque jamais n’en fait lui-même une utilisation autonome. » [14]
La réforme des retraites – dont nous avons montré le caractère inconstitutionnel – illustre la crise profonde du droit public au sein de nos institutions de la 5ème République dont la pente naturelle et consubstantiellement autoritaire conduit nos gouvernants – même lorsque leur légitimité est incertaine, fragile, voire inexistante – à gouverner au mépris de la Constitution et en même temps contre le peuple, considérant eux-mêmes détenir la vérité politique du moment.
Le régime politique sous lequel nous vivons aujourd’hui et censée exprimer une « 5ème République » n’a accouché que d’une monarchie élective dont le mode de fonctionnement – plus archaïque que moderne et fermé à l’ère démocratique de la souveraineté des peuples – éloigne les gouvernants des citoyens que normalement ils sont supposés représenter.
Notre cinquième République, depuis ses origines, s’éloigne de l’esprit des lumières du 18ème siècle car elle n’est pas faite pour un peuple majeur qui ne saurait accepter sa mise en tutelle quasi permanente au profit d’une caste politique professionnelle élitaire qui se reproduit au fil des ans – sous de pseudo nouveaux labels politiques trompeurs (En Marche, Renaissance, MoDEM, LR) – pour conserver le pouvoir d’Etat et ainsi gouverner dans l’intérêt exclusif d’une minorité de privilégiés qui accaparent les richesses d’une manière aussi indécente qu’insolente comme jadis la Noblesse d’Ancien Régime accaparait les privilèges et les honneurs.
Louis SAISI
Paris, le 26 février 2023
SIGLES ET ABREVIATIONS
AVA = Assurance Vieillesse des Aidants (proposition inscrite dans le projet gouvernemental sur la réforme des retraites)
C2P = Compte professionnel de prévention
CMP = Commission Mixte Paritaire
CNews = CNews (abréviation de Canal News), anciennement connue sous les noms d’« I-Télévision » puis « I-Télé », est une chaîne de télévision d’information en continu nationale française. En , à la suite de la reprise en main du groupe Canal+ par Vincent Bolloré et d’une grève d’un mois de la rédaction pour réclamer son indépendance, I-Télé est rapidement paralysée par le départ de plus des trois quarts de ses journalistes. La chaîne est rebaptisée CNews le . Sa nouvelle ligne éditoriale est décrite comme très ancrée à droite, avec une orientation marquée de plus en plus à l’extrême droite. Elle est souvent considérée comme l’équivalent français de la chaîne américaine Fox News.
CSA = Consumer Science & Analytics. Entreprise créée en 1999 donnant naissance au troisième groupe d’études généraliste sur le marché français. En 2006, Bolloré fait son entrée au capital de CSA, à hauteur de 40 %. Il en devient l’actionnaire unique en 2008. En , CSA intègre le groupe Havas et adopte une nouvelle signature au service de la compréhension de l’individu et de l’activation des cibles. CSA, Consumer, Science & Analytics qui regroupe deux entités CSA Research (intervenant sur les activités historiques d’études marketing et d’opinion de l’entreprise) dirigé par Ketty de Falco et CSA Data Consulting (ex-entité data d’Havas) dirigé par Thierry Fontaine.
Intersyndicale = Il s’agit de la réunion de différents syndicats d’un même secteur d’activité, d’une entreprise, ou l’ensemble des organisations syndicales d’une zone géographique déterminée (ville, canton, région, pays, voire au niveau international) pour mener des actions revendicatives communes. Il existe, depuis 2008 en France, une Intersyndicale ayant élaboré une plate-forme revendicative commune et mené des actions nationales. Elle regroupe les huit syndicats suivants : CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC, UNSA, Solidaires et FSU. S’agissant de l’Intersyndicale luttant contre la réforme des retraites, outre les 8 syndicats précités qui la composent, elle a été rejointe par cinq organisations de jeunesse.
LFI = La France Insoumise
LO = Loi organique. Dans le prolongement de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), les lois de financement de la Sécurité sociale sont placées sous le régime de la loi organique relative aux lois de financement de la Sécurité sociale (LOLFSS). Les lois organiques sont en général prises en application de la Constitution et sont donc soumises automatiquement au Conseil constitutionnel pour contrôle de leur constitutionnalité.
LR = Les Républicains
MoDem (ou MoDEM) = Mouvement Démocrate
NUPES = Nouvelle Union populaire écologique et sociale (NUPES). Elle désigne l’alliance politique de plusieurs partis de gauche (LFI, PS, PCF, Europe-Ecologie-Les Vers), lancée en France avant les élections législatives de juin 2022.
PCF = Parti communiste français
PME = Petites et moyennes enreprises
PLFRSS = Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (véhicule législatif utilisé inconstitutionnellement par le Gouvernemen pour la réforme des retraites). De la même manière qu’un projet de loi de finances rectificative (ou collectif budgétaire) permet d’ajuster le budget de l’année en cours, le Gouvernement peut revoir ou ajouter certaines dispositions liées aux comptes de la Sécurité sociale, via un PLFRSS. Mais à la différence du PLFR, qui a lieu chaque année, le PLFRSS est extrêmement rare. De mémoire des spécialistes du Parlement, on n’en compte que deux : en 2011 et 2014. Cette rareté s’explique. Si les crédits adoptés pour le budget de l’Etat sont fixes, ceux du PLFSS ne sont pas limitatifs. Il n’y a pas de blocage pour dépenser plus durant l’année. On peut attendre le budget de la Sécu suivant pour adopter les éléments rectificatifs (source Public Sénat) .
PS = Parti socialiste
NOTES
[1] Pas seulement à l’Assemblée nationale et sur le banc du Gouvernement mais aussi dans la presse et les médias.
[2] Il est difficile de se faire honnêtement une idée exacte et précise du nombre total d’amendemens ainsi que de ceux imputables à LFI, les chiffres variant d’un journal à un autre. Selon Le Monde : « Réforme des retraites : environ 20 000 amendements déposés à l’Assemblée, dont plus de la moitié par le groupe LFI », Le Monde en ligne du 2 février 2023. Le Figaro, lui, donne un chiffre total plus élevé de plus de 22 000 amendements dont 90% seraient attribuables à LFI.
[3] Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale n°760 pour 2023.
[4] DALLOZ Etudiant Le billet : « L’article 47-1 de la Constitution et la réforme des retraites » [ 6 février 2023 ].
[6] Information rapportée par BFMTV le mardi 21 février 2023.
[7] Quotidien « 20 minutes » du 7 février 2023 : « Réforme des retraites : L’utilisation du 47.1, « détournement de procédure » ou procédure « habituelle » ? DROIT : Entre cavaliers budgétaires et atteinte à la sincérité du débat parlementaire, la réforme des retraites pourrait se retrouver devant le Conseil constitutionnel (Diane REGNY).
[8] « 20 minutes » du 7 février 2023 précité.
[9] « 20 minutes » du 7 février 2023.
[10] « 20 minutes » du 7 février 2023 précité.
[11] Dont, comme l’on s’en souvient, le faible score de la candidate LR Valérie PECRESSE, à la dernière élection présidentielle de 2022, en a été la vivante et éloquente préfiguration, le vivier électoral de la droite conservatrice libérale étant le même.
[12] La Première ministre s’était empressée d’annoncer que pour les salariés ayant commencé à travailler avant 21 ans, ils n’auraient pas à cotiser plus de 43 ans pour partir à la retraite, dès lors qu’ils auront atteint l’âge de départ anticipé requis. Matignon avait même ensuite complété en précisant qu’il serait possible de partir sans décote avec ces 43 ans de cotisations.
[13] Décision n° 2021-832 DC du 16 décembre 2021, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, cf. JORF N° 0299du 24 décembre 2021, texte N°4.
[14] Lauréline FONTAINE : « La violation de la Constitution : autopsie d’un Crime qui n’a jamais été commis », article paru dans la Revue du Droit Public et de la science politique en France et à l’étranger (dite Revue du Droit Public, ou encore R.D.P.), 2014, n°6, pp.-1617-1638.